Richès Karayib a eu l’honneur de s’entretenir avec Antoine Dinguiou, un artiste guyanais passionné, connu pour son travail autour du Tembe, un art traditionnel propre à la communauté Bouchiningue. Artiste peintre et sculpteur, Antoine partage avec nous son parcours, ses inspirations, et son engagement pour la préservation du patrimoine culturel guyanais.
Découvrons l'artiste
Pouvez-vous vous présenter ?
Je m’appelle Antoine Dinguiou, je suis originaire de la commune de Papaïchton en Guyane, capitale des Pays Boni. Mon nom Bouchiningue est Antonichy, mais je suis plus connu sous le surnom “Toto”.
Vous êtes artiste peintre et sculpteur, pouvez-vous nous en dire plus sur votre travail ?
Je suis avant tout un artiste qui travaille sur le Tembe, un art majeur au sein de la communauté Bouchiningue. Le tembe est un moyen de communication issu de la période d’esclavage, où les esclaves utilisaient des codes visuels pour échanger des messages. Aujourd’hui, c’est un art unique, qui conserve des motifs et des symboles complexes, transmis de génération en génération.
Quels sont vos projets actuels en Guyane ?
Je travaille actuellement sur plusieurs projets, dont une exposition au Royal Amazonia en hommage à Antoine Lamouraille, un des doyens de notre communauté. En parallèle, j’enseigne l’art du tembe à des jeunes, afin de perpétuer ce savoir-faire. J’ai également une mission au sein des communautés amérindiennes, où nous échangeons nos savoirs respectifs.
Quelles sont vos principales sources d’inspiration ?
Mon inspiration vient avant tout de l’histoire de mon peuple et des valeurs de liberté, de partage et de respect que le tembe véhicule. Je m’efforce de transmettre ces valeurs à travers mon art.
Avez-vous rencontré des difficultés au cours de votre carrière ?
Les défis principaux que j’ai rencontrés étaient liés au manque de reconnaissance et de soutien. Mais j’ai eu la chance de recevoir le soutien de personnalités influentes comme Élie Castor, ce qui m’a permis de faire mes premières expositions, notamment au Festival d’Angoulême en 1992.
Quel est l’événement dont vous êtes le plus fier ?
L’exposition qui m’a le plus marqué a eu lieu à l’Île de Gorée au Sénégal en 2011. J’étais accompagné de Madame Taubira et ce moment a été une véritable immersion émotionnelle. J’ai ressenti un lien profond avec mes ancêtres, et ce voyage a bouclé un cycle important dans ma vie.
Quels sont vos projets futurs ?
Je souhaite continuer à transmettre le tembe aux jeunes générations, afin que cet art, qui fait partie intégrante du patrimoine guyanais, reste vivant. Mon rêve serait que la Guyane, avec toutes ses richesses culturelles, trouve une meilleure reconnaissance au sein de la Caraïbe et du monde entier.
Quel serait votre plus grand rêve artistique si vous aviez une baguette magique ?
Mon rêve serait de créer un espace où nous pourrions tous mieux nous connaître au sein de la Caraïbe. Nous avons été divisés par l’histoire, mais en apprenant à nous comprendre, nous pourrions reconstruire les liens brisés et faire revivre les richesses de notre héritage commun.
Comment voyez-vous l’évolution de votre métier face à l’ère numérique ?
Le numérique est inévitable, mais il est essentiel de préserver certains savoir-faire au sein des communautés. J’accepte l’évolution, mais je veille à ce que les codes traditionnels du Tembe ne soient jamais totalement divulgués en dehors de notre culture.
Découvrons quelques unes de ses oeuvres
Quelques oeuvres exposées à l'Hotel Mercure Royal Amazonia
Antoine Dinguiou incarne la transmission et la préservation d’une culture précieuse et unique. Grâce à son art et son engagement, il contribue à garder vivants les savoirs ancestraux de la Guyane tout en les partageant avec le monde. Ses œuvres, empreintes de spiritualité et d’histoire, sont des ponts entre passé et futur, tradition et modernité.